La route en corniche de la Réunion : Un projet ambitieux entre terre et mer

L’île de La Réunion est souvent au centre de projets d’infrastructure grandioses, et la nouvelle route du littoral n’échappe pas à cette règle. Depuis son lancement en 2010, ce chantier titanesque est devenu l’un des plus scrutés du monde pour ses coûts exorbitants et ses difficultés techniques. Revenons ensemble sur les grandes étapes et les principaux enjeux de ce projet.

Historique du projet de la route en corniche : une décennie de travail

Le contexte initial

L’idée de créer une nouvelle route longeant le littoral réunionnais a émergé face aux nombreux dangers que présente la route actuelle, notamment les chutes de pierres et les éboulis liés à l’instabilité des falaises. En effet, depuis sa création en 1976, cette route a été le théâtre de nombreuses tragédies causées par ces éléments naturels imprévisibles.

Lors du lancement officiel en 2010, sous l’égide de Didier Robert, ancien président de Région, plusieurs solutions ont été envisagées : construire un tunnel, installer des barrières pare-avalanches ou même développer un tram-train. Cependant, la décision finale s’est portée sur une infrastructure routière sur la mer, divisée en deux tronçons distincts : un viaduc et une digue.

Les premières années de travaux

Dès le départ, le chantier de la route en corniche s’est révélé être un véritable défi technique et écologique. Les autorités avaient sous-estimé la complexité liée à l’approvisionnement en matériaux nécessaires à la construction de la digue. Cette carence a non seulement ralenti les travaux mais a également engendré des surcoûts considérables. De plus, diverses investigations judiciaires et financières, concernant notamment des accusations de corruption et de favoritisme, sont venues ternir l’image du projet.

Les dates clés du projet

2010 : Lancement officiel du projet de la Nouvelle Route du Littoral (NRL) par l’ancien président de Région, Didier Robert.

2020 : Abandon du projet de construction de la partie digue faute de matériaux.

28 août 2023 : Ouverture partielle à la circulation d’un tronçon de 8,7 km de la nouvelle route du littoral, dans un sens uniquement (de Saint-Denis à la Grande Chaloupe).

2021 : La nouvelle mandature à la tête de la Région La Réunion hérite du projet et promet de terminer la route, en optant pour le « tout viaduc » au lieu de la digue initialement prévue.

2028-2030 : Date estimée de livraison complète de la route, selon l’annonce de la présidente de Région, Huguette Bello, impliquant un retard d’environ 10 ans sur la date initiale prévue.

Des éléments naturels impitoyables

La lutte contre la nature

À La Réunion, les routes côtières sont particulièrement exposées à des conditions climatiques extrêmes. Les fortes pluies provoquent fréquemment des éboulements de la falaise qui surplombe la route. Malgré l’installation de filets métalliques et de barrières de protection, la circulation reste périlleuse lors de mauvais temps, obligeant les autorités à basculer la circulation sur une voie unique dans certains cas, créant ainsi d’énormes embouteillages.

De leur côté, les vagues océaniques n’épargnent pas non plus cette infrastructure. Même avec la pose de tétrapodes géants en béton conçus pour briser les vagues, certains véhicules se retrouvent régulièrement emportés par la houle durant les tempêtes tropicales.

Une solution définitive ?

C’est pour toutes ces raisons qu’une conception aussi complexe que celle de la nouvelle route du littoral a été pensée. L’idée était de réaliser un tracé suffisamment élevé et robuste pour résister aux assauts de la mer, tout en transitant loin des falaises friables. Ce projet prévoit également des tunnels et viaducs en mer, complétés par une infrastructure ferroviaire future sous forme de train-tram, espérant désengorger le trafic routier.

Progrès réalisés et obstacles rencontrés

Une ouverture partielle

Après douze ans de planification et de constructions laborieuses, une portion de la nouvelle route en corniche a finalement été ouverte à la circulation en août 2022. Bien que limitée à une seule direction – de Saint-Denis à La Grande Chaloupe – cette ouverture représente un premier grand pas vers la modernisation des infrastructures routières de l’île.

Cette voie offre une vue spectaculaire sur l’océan Indien, permettant aux automobilistes de dominer le paysage à partir d’une hauteur respectable. Avec une limitation de vitesse à 50 km/h à certains endroits, cette expérience routière devient presque touristique, bien que de nombreux défis restent à relever pour achever la totalité du parcours jusqu’à La Possession. L’ouverture de la totalité de la route en corniche est estimée à 2030, mais nous ne sommes pas à l’abri d’autres surprises.

Surcoûts et retards

Un point central de ce projet est sans conteste son coût pharaonique. Considéré comme l’une des routes les plus coûteuses au monde, son coût initial a été estimé à 1,66 milliard d’euros. Elle a nécessité des financements colossaux dont les dépassements budgétaires ont souvent fait la une des journaux locaux et internationaux. La cour des comptes aurait mentionné un dépassement de 300 millions d’euros. Des imprévus tels que la rareté des matériaux, les complications écologiques et les malfaçons techniques ont conduit à repousser la date de livraison finale estimé initialement à 2023, et maintenant, repoussé au-delà.

Avenir et perspectives

Un espoir pour les usagers

Malgré tous ces aléas, la route en corniche représente un réel espoir pour les habitants de l’île. L’amélioration prévue de la sécurité routière devrait permettre de réduire significativement les accidents liés aux chutes de pierres et aux intempéries maritimes. De plus, l’ajout futur du train-tram offrira une alternative aux trajets en voiture, réduisant ainsi les embouteillages chroniques auxquels les Réunionnais sont confrontés quotidiennement. J’en profite pour passer un message pour ceux qui souhaitent s’installer à la Réunion ; n’oubliez pas de prendre en compte cet aspect de la vie.

Vers une solution durable

L’ambition derrière ce projet va au-delà de la simple relocalisation d’une route. Il s’agit de transformer un axe vital pour l’économie locale et la vie quotidienne, en quelque chose de plus sûr et plus moderne. Ces améliorations devraient également avoir un impact positif sur l’environnement en proposant des options de transport moins polluantes telles que le train-tram.

Malgré des débuts tumultueux et des critiques acerbes, la nouvelle route du littoral symbolise la possibilité d’un avenir meilleur pour les déplacements à La Réunion. Une fois entièrement réalisée, elle promet de devenir un modèle d’infrastructure adaptable aux conditions extrêmes tout en répondant aux besoins modernes de mobilité. Le chemin est encore long, mais l’objectif reste à portée de main pour révolutionner le réseau routier de l’île.